La bio en restauration collective : le marché de tous les possibles

28 août 2016

On n’y croyait plus mais tant les derniers indicateurs de l’Agence Bio que deux amendements portés par la députée Brigitte Allain et entrés in extremis dans le projet de loi « Egalité et Citoyenneté » nous laissent espérer, enfin, que la bio s’installe et progresse en restauration collective.

Les chiffres de l’Agence Bio d’abord

+ 18% entre 2014 et 2015 représentant un total de 225 millions d’euros hors taxe d’achats hors pain, c’est un score jusque là inégalé. Bien que ce chiffre remarquable puisse sembler dérisoire au regard de la progression de la bio dans d’autres secteurs, il doit être salué.

En effet, les produits consommés par la restauration collective sont bien différents de ceux du consommateur lambda. Ce sont pour l’essentiel des légumes et des fruits frais bruts ou semi-transformés (4ème gamme) et des produits laitiers. Tant la 4ème gamme que les produits laitiers nécessitent des outils de transformation souvent à l’échelle d’un territoire. Les engagements financiers et la garantie pérenne d’un marché rendent la viabilité économique de ces outils souvent difficiles sauf engagement clair des collectivités ou de sociétés de restauration concédée. L’exercice est souvent périlleux mais de plus en plus d’acteurs souhaitent s’investir.

La progression de la restauration collective est d’autant plus intéressante que l’approvisionnement est essentiellement local : 78 % des produits bios achetés sont effectués à l’échelle régionale. La restauration collective est sans aucun doute l’un des meilleurs moyens de structurer des filières car les volumes nécessaires à assurer les approvisionnements sont très importants.

La restauration collective est sans aucun doute l’un des piliers d’un Plan d’Alimentation territorial et, pour peu que les élus et les gérants aient fait appel aux bons outils et aux bons interlocuteurs (cf la boîte à outils du Ministère de l’Agriculture et surtout le répertoire approvisionnement rhd de RepasBio.org), ils pourront construire des menus adaptés aux besoins de leurs convives et à la production locale.  L’intérêt bien compris d’un Plan d’Alimentation Territorial et l’introduction de produits bio dans la restauration collective n’ont d’intérêt que s’ils permettent de structurer durablement des filières lesquelles deviendront économiquement viables de part leur développement. Je souhaite ici attirer votre attention sur le remarquable travail du réseau Corabio en Rhône-Alpes. Certes, la région est formidablement servie côté bio, mais le travail mené depuis quelques années par ce réseau est exemplaire et notamment dans l’ensemble des secteurs de la restauration collective (scolaire comme entreprises).

Des débats inutiles autour d’un acquis

Le Grenelle de l’environnement dans sa circulaire du 2 mai 2008 avait inscrit dans le marbre l’objectif de 20% de bio en restauration collective à l’orée de 2012. Bon nombre de collectivités s’étaient emparées de cet objectif. Depuis quelques temps, les multiples crises de l’agriculture conventionnelle aidant, elles tentaient de se désengager de cet objectif au profit de l’agriculture locale.

Une députée de Dordogne, Brigitte Allain ainsi qu’un sénateur du Morbihan, Joël Labbé subirent ces derniers mois l’ire de leurs paires quand ils inscrivirent à nouveau, dans une proposition de projet de loi sur l’ancrage territorial de l’alimentation, l’objectif de 20% de produits bios dans la restauration collective des collectivités. On assista alors à des échanges qu’on aurait pu croire d’un autre temps, emprunts soit de mauvaise foi, soit de méconnaissance des circuits entre agriculture et alimentation. On nous a resservi, entre autres, l’impossibilité pour la bio de garantir l’approvisionnement demandé.

Or, atteindre 20% d’approvisionnement en bio et local ou à tout le moins français est possible comme l’a rappelé la FNAB dans un communiqué récent. « Moins de 400 000 hectares sont nécessaires pour fournir 20 % de bio en restauration collective. Les acteurs de terrain le savent bien, ce n’est pas une question de quantité mais d’organisation des filières et d’adéquation entre l’offre et la demande locale ».
http://www.repasbio.org/sites/default/files/communiqueloiancrageterritorialfnab.pdf

Brigitte Allain est une convaincue et une entêtée. Elle a réussi à glisser cet objectif dans un amendement adopté in extremis dans le projet de loi Egalité et Citoyenneté. Espérons que les sénateurs, bien souvent maires, se souviendront que ce sont eux qui ont permis d’atteindre les résultats de + 18% de croissance de cette année.

Espérons aussi qu’ils auront eu le temps de se rendre compte que s’ils veulent faire la part belle à des produits locaux dans leur restauration collective, les seuls actuellement suffisamment structurés en circuits courts pour répondre à cette demande sont les producteurs bios suffisamment indépendants des circuits longs  pour pouvoir choisir leurs débouchés et leurs clients si tant est que ceux-ci acceptent de se pencher quelques minutes sur la saisonnalité, faire le lien entre l’alimentation et l’agriculture et payer à un prix équitable la qualité et la fraîcheur de l’alimentation de leurs enfants et des convives.

Tribune libre par Marie-Dominique Tatard-Suffern, consultante en restauration collective bio

Les liens recommandés pour construire un cahier des charges ou un appel d’offre adhoc :
http://www.repasbio.org/sites/default/files/2016_fnab_repertoireapprorhd.pdf

Sources : http://www.agencebio.org/sites/default/files/upload/dossier_de_presse_mai_2016_pdf.pdf

http://www.repasbio.org/sites/default/files/communiqueloiancrageterritorialfnab.pdf


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