OGM et environnement

11 octobre 2016

Les plantes génétiquement modifiées (PGM) posent deux grandes sortes de question quant à leur impact environnemental : permettent-elles de réduire la consommation de pesticides (insecticides et herbicides) ? Les PGM peuvent-elles cohabiter avec d’autres cultures ?

Plus ou moins de pesticides avec les OGM ?

La très grande majorité des PGM actuellement commercialisées sont des « plantes pesticides » : soit elles tolèrent un ou des herbicides (plantes Roundup Ready, Liberty Link…), soit elles produisent dans leurs cellules une ou des protéines insecticides (plantes Bt). Certaines plantes transgéniques cumulent les deux caractéristiques. Argument de vente des entreprises : ces plantes vont permettre de diminuer la quantité de produits chimiques utilisés en agriculture donc également l’énergie pour les produire et les épandre, ce qui limitera aussi la pollution.

Mais réfléchissons : une même entreprise vend la plante GM et l’herbicide associé. Dans un premier temps, la culture d’une PGM qui tolère un herbicide peut entraîner la réduction d’application d’autres herbicides, mais pas de l’herbicide associé à cette PGM. Aux États-Unis par exemple, l’expertise collective Inra-CNRS menée en 2011 souligne des hausses de l’usage des herbicides, pour la période 1995 à 2007, pour le maïs GM (+25%), le soja GM (+11%) et le coton GM (+13%). Elle ajoute qu’en 2011, « ces tendances sont confirmées avec des indications similaires pour le soja au Canada, au Brésil et en Argentine ».

D’où vient l’augmentation ?

La plante est conçue pour survivre aux pulvérisations d’herbicides qui détruiront toutes les « mauvaises herbes » (adventices) , sauf la PGM : l’agriculteur peut donc avoir « la main lourde » sans détruire sa culture. D’autre part, en utilisant en permanence le même herbicide, les adventices deviennent résistantes. Pour les détruire, il faut soit procéder à un arrachage manuel, soit augmenter les doses de l’herbicide déjà utilisé, soit encore utiliser des herbicides plus toxiques tels que l’atrazine, le 2,4-D, etc.

Les adventices résistantes ne sont pas les seules plantes qui sont difficiles à éliminer : par exemple, les repousses de colza GM tolérant un herbicide dans un champ de soja tolérant le même herbicide sont aussi problématiques.

L’utilisation croissante d’herbicides pose des problèmes environnementaux : effets sur la biodiversité (moins de flore donc moins de nourriture pour la faune les consommant donc impact sur l’ensemble de  la chaîne alimentaire), contamination notable des eaux et des sols, etc.

Plante Bt : une réduction en trompe-l’œil.

Les plantes Bt produisent elles-mêmes leur protéine(s) insecticide(s) en continu et dans toutes les cellules, pour tuer l’insecte qui veut les manger. La culture des PGM produisant une protéine insecticide (les PGM Bt) a effectivement conduit à une diminution de la quantité épandue d’insecticides. Mais  les quantités d’insecticides produites par la plante, peu connues, ne sont jamais intégrées dans le bilan final. Par ailleurs, des résistances chez les insectes cibles apparaissent, d’où le besoin d’utiliser des insecticides chimiques plus toxiques.

Enfin, l’efficacité des plantes Bt peut entraîner la prolifération de parasites auparavant mineurs, ce qui implique aussi d’utiliser des insecticides contre ces derniers. La solution ? Une approche « bio », qui ne cherche pas à éliminer totalement une population de prédateurs, mais à s’assurer que les populations d’insectes soient en équilibre avec leur milieu, afin qu’aucunes ne prolifèrent et ne dévastent la culture.

Qu’appelle-t-on la coexistence des filières OGM / non OGM ?

Il est impossible d’éviter que les insectes pollinisateurs ou le vent disséminent le pollen des PGM. Or, les transgènes sont présents et actifs dans le pollen. Si ce pollen « transgénique » rencontre des plantes sexuellement compatibles non transgéniques, il pourra les féconder, engendrant une descendance en partie transgénique. Cela fonctionne non seulement entre espèces cultivées mais aussi entre espèces sauvages. Ainsi, dans l’Union européenne, du maïs OGM ne pourra contaminer que des parcelles de maïs, mais du colza OGM (non autorisé pour le moment à la culture) pourrait se croiser avec de nombreuses plantes apparentées comme la ravenelle ou la moutarde. Des contaminations tout au long de la chaîne agro-alimentaire (transport, stockage, transformation, distribution), peuvent aussi se produire, ruinant les autres productions (biologiques, « sans OGM » ou conventionnelles).

Certaines mesures de coexistence sont mises en place : zone tampon cultivée avec des plantes non transgéniques autour du champ de PGM ; barrières végétales (haies hautes), afin de piéger le pollen ; décalage des dates de semis, etc. Des équipements dédiés (moissonneuse, silo, camion, etc.) doivent aussi être utilisés pour éviter les contaminations.

La dernière question est de savoir qui prend en charge le coût de cette coexistence, de cette ségrégation des filières et qui est responsable en cas de contamination. Actuellement, ceux qui refusent les OGM doivent prendre en charge les coûts d’analyse pour vérifier que les semences achetées sont indemnes, et les apiculteurs  doivent les éloigner leurs ruches des champs transgéniques… Les transgéniculteurs, eux, doivent mettre en place les zones tampons, prévenir les voisins, décaler les semis le cas échéant. Mais comment déterminer exactement qui est responsable d’une contamination ? Qui devra payer ? Aucune assurance contre les OGM n’existe sur le marché…

Les mesures préconisées ne visent pas l’absence d’OGM dans les produits non OGM, mais à limiter cette présence en dessous d’un seuil déterminé. Mais tous s’accordent  sur le fait qu’une ségrégation stricte des filières (en dessous du seuil de 0,1% d’OGM) est très difficile et surtout extrêmement coûteuse. L’étude européenne CoExtra concluait en effet : « La coexistence des filières ne serait possible qu’en employant de grandes distances d’isolement ou dans des zones dédiées de production ». Encore faudrait-il trouver une région qui accepterait d’accueillir des OGM et de stopper du même coup sa production de produits bios !

Par Christophe Noisette,  rédacteur Inf’OGM


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